La petite trotteuse, roman

Michèle Lesbre

Sabine Wespieser Éditeur

  • Conseillé par
    29 août 2012

    Roman de Michèle Lesbre.
    Anne, la narratrice visite des maisons comme d’autres fuient. Elle ne veut pas les acheter, mais seulement passer un moment dans chacune d’elles. « Les endroits où je ne faisais que passer me procuraient une paix incomparable qu’aucun espace de mon propre univers ne m’avait jamais apportée. Le statut de nomade que j’étais en train d’acquérir depuis quelque temps devait s’expliquer ainsi. » (p. 23) Dans ces endroits anonymes, elle est en quête d’une chose dont elle n’a pas vraiment conscience. « Je montais dans les trains et sillonnais les campagnes, à la recherche d’un endroit où je trouverais enfin ce que je cherchais et que je ne savais nommer. » (p. 24)

    Près de Nantes, elle prévoit de visiter une maison cachée dans une pinède. Dans l’auberge où elle est descendue, elle rencontre Alex qui mène un projet de théâtre éphémère. Sa chambre est toujours ouverte, comme une invitation à fureter et à investir une autre vie. Pour Alex, rien n’est plus précieux que l’éphémère et Anne souscrit rapidement à cette idée. « Maintenant je ne crois qu’en ce qui est provisoire. La vie me semble plus précieuse ainsi. » (p. 81)
    Qu’il s’agisse du chat de l’auberge ou de la maison qu’elle visite, tout ramène Anne vers ses douleurs d’enfance. Elle garde dans sa poche la montre arrêtée de son père, celle qui a ouvert la porte du passé. Comme la trotteuse de la vieille montre, le temps semble suspendu et ses frontières, devenues perméables, s’abolissent : le passé empiète sur le présent et le futur s’inscrit dans l’immédiat. « Le passé, même lointain, est toujours tapi quelque part, prêt à bondir. » (p. 99) Pour la narratrice, le passé s’incarne dans le souvenir de son père, un homme longtemps malade et trop tôt disparu. S’opposait à lui la mère, une femme dure et frivole. En marchant sur les traces des années passées, Anne veut raviver l’image perdue de son père. L’apaisement final est comme une horloge dont le balancier reprend sa course, la fin d’une parenthèse immobile.
    Ce court roman de Michèle Lesbre est très troublant, voire déroutant. La plume est toujours belle, lente et mélancolique. Mais je me suis un peu perdue dans les errances de la narratrice. Le puzzle est long à se mettre en place. Il faut peut-être lire ce texte en une fois pour ne pas perdre le souffle de l’histoire.