Les Vitraux de Joseph Albers

S’il fut l’un des plus influents théoriciens de la couleur au XXe siècle, Albers est davantage connu pour ses séries de peintures tardives intitulées Hommage au carré peintes à partir de 1948 dans des gammes infinies de couleurs franches, posant les principes de l’art optique. Cette exposition et l’ouvrage qui l’accompagne est la première manifestation entièrement consacrée à l’œuvre que Josef Albers réalisa dans la célèbre école allemande du Bauhaus pendrant treize années de 1920 à 1933. Après avoir été l’élève de Johannes Itten, il fut l’un des principaux professeurs du Bauhaus au côté de Paul Klee et de Wassily Kandinsky, et marqua de son enseignement des générations d’artistes. Le Manifeste du Bauhaus créé par Gropius en Allemagne à Weimar en 1919 promettait une école d’art nouvelle formule, dont les visées et l’enseignement devaient nettement se distinguer les critères traditionnels de formation. Au Bauhaus, Albers réalisa en particulier des vitraux sans plomb, faits de formes géométriques de deux ou trois couleurs, qui sont de conception résolument nouvelle et une avancée importante dans la modernité. Il reçoit des commandes de vitraux monumentaux qui seront tous démolis pendant la guerre : vitraux pour les maisons Sommerfeld, et Otte à Berlin et pour le musée Grassi de Leipzig qui sont des assemblages de formes asymétriques ou des compositions basées sur des structures strictement géométriques et sérielles. En parallèle, il se lance dans une production d’œuvres en verre, d’une conception absolument nouvelle, qu’il considérait comme des peintures à accrocher au mur ou comme des éléments d’architecture à intégrer dans une construction enchâssé dans du plomb ou tout autre support. Aujourd’hui ces œuvres en verre sont rares et peu connues. Elles annoncent ce qu’ensuite il laissa comme enseignement ou ses célèbres tableaux Hommages au carré.L’exposition comprend plus de 260 oeuvres dont la presque totalité des pièces en verre soit 58 vitraux conçus pour être des « tableaux » sur un mur ou pour s’inscrire dans l’architecture que prônait le Bauhaus. L’ouvrage croise toutes les recherches de l’artiste qui créa des meubles, fit des photographies, inventa des typographies, conçut des gravures noires et blanches dont les rythmes annoncent l’Op art. Josef Albers était fasciné par les propriétés de matériaux et par leurs possibilités une fois mises en forme comme le papier. Grâce à ses photographies, il est possible de comprendre la vie au Bauhaus et son enseignement particulièrement original et inventif. Il réalisa de nombreuses photographies dans la nature, s’intéressant particulièrement aux rendus de matières (terre, eau, arbres, plantes), aux contrastes de lumière et à la mise en perspective. Il fit des montages de photographies avec des portraits de ses condisciples, Paul Klee, Wassily Kandinsky, Ozenfant, El Lissitzky, Schlemmer… Albers fut l’un des enseignants qui resta le plus longtemps au Bauhaus (1920-1933) qu’il fut obligé de quitter à sa fermeture par les nazis pour trouver refuge aux Etats-Unis où il enseigna avec sa femme Anni Abers au Black Mountain College en Caroline du Nord de 1933 à 1949 puis au Département de design à la Yale University, jusqu’en 1958.