wens

8,65
Conseillé par
27 mai 2012

Le livre de Charyn ne ressemble à aucun ouvrage policier ou noir classique. Quand les cadavres s'accumulent, ils ne donnent jamais lieu à des enquêtes, les flics ne cherchent pas à arrêter les coupables qu'ils connaissent et fréquentent. La mort fait partie du paysage, un meurtre appelle logiquement un autre meurtre. Car dans le Bronx, les gangs cherchent à asseoir leur suprématie pour contrôler les trafics, en particulier celui des stupéfiants. Certaines bandes armées jusqu'aux dents agissent avec la bénédiction ou la complicité des "Apaches", les flics de la brigade spéciale du Bronx. Le rôle des flics est d'éviter les bains de sang. La pseudo-sécurité du quartier déshérité est un enjeu électoral pour des politiciens ambitieux, un moyen de se faire remarquer par les médias, une étape pour accéder à la plus haute marche du pouvoir : la Maison Blanche. Dans cet univers, Isaac Sidel, l'ancien flic devenu maire de New-York, continue de gérer le Bronx à coups de revolvers, le Glock à la ceinture.

Charyn dépeint New-York sans complaisance, il dénonce les magouilles policières, politiciennes, la violence quotidienne, il montre une réalité urbaine peu reluisante. De ce fait, l'intrigue est secondaire. Le lecteur finit par oublier le point de départ du roman, une grève de joueurs de base-ball. Et c'est bien là que réside la faiblesse de l'ouvrage. Charyn sait multiplier à l'infini ses descriptions sur le quartier, dresser le portrait de gens pittoresques, se régaler à fréquenter Isaac Sidel, dit le Gros. L'auteur est capable d'écrire quelques milliers de pages sur le Bronx mais il oublie de donner une solide ossature à son roman. Aussi le style brillant et poétique de l'auteur ne parvient pas au fil des pages à retenir notre attention. J'ai quitté Sidel sans regret.

roman

Seuil

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27 mai 2012

Un policier choral

Europa blues de Arno Dahl policier appartient au genre policier que l'on peut qualifier de choral. Il n'existe pas de personnage central ou sa variante le duo classique, mais l'enquête est réalisée par une série d'inspecteurs qui participent à la même résolution de l'affaire. Difficile de ne pas faire penser à Ed Mac Bain et à ses flics du 87°district, et aussi à Martin Beck et ses adjoints sortis des livres des auteurs Sjöwall et Wahlöö.

A Stockholm, une unité spéciale d'une dizaine policiers est chargée de résoudre les crimes de "catégorie internationale". Cette équipe soudée, majoritairement constituée de vieux routiers, est commandée par Jan-Olov Hultin qui semble atteint par un Alzheimer précoce comme l'atteste son incontinence et ses trous de mémoire de plus en plus fréquents.

A Stockholm, l'équipe se trouve aux prises avec une série d'événements qui vont rapidement apparaitre étrangement liés: la mort d'un proxénète dévoré par des gloutons dans le zoo du Skansen et le meurtre horrible d'un vieillard, ancien déporté dans le cimetière juif. Ils sont persuadés que ces affaires se raccordent avec la fuite de prostituées de l'Europe de l'Est et la découverte du cadavre d'un jeune malfrat sous les rames du métro.

Mais toutes les réponses ne se trouvent pas seulement à Stockholm, mais aussi à Odessa, Milan, et Weimar l'ancienne capitale de la première république allemande qui vit passer Schiller, Goethe, Bach… Weimar la capitale culturelle fut aussi le berceau des jeunesses Hitlériennes, et aux portes de la ville, fut construit le camp de concentration de Buchenwald.

Les enquêteurs trouveront dans les archives de l'Histoire les clés de la résolution de leur enquête. Et le livre devient dérangeant. Dans Europa Blues, le Suédois Arne Dahl rappelle les complicités de son pays et de la Finlande voisine avec le régime nazi et ses théories et pratiques racistes.

Dahl construit impeccablement son histoire d'enquêtes parallèles en faisant varier habilement les tonalités, il sait alterner les scènes dramatiques, d'actions et manie régulièrement l'humour. La tension monte progressivement jusqu'au dénouement final.

Arne Dahl confirme avec Europa blues, un titre totalement justifié, ses grandes qualités d'écrivain.

Définition de Blues: complainte du folklore noir américain au rythme lent qui est à l'origine de la musique de jazz. Familier : cafard, mélancolie, idées sombres: Avoir le blues. Dictionnaire Larousse.

Anne-Marie Métailié

17,50
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9 avril 2012

Un thriller économique efficace.

Andrea Camilleri nous emmène dans les coulisses d'une grande entreprise italienne, dirigé par son fondateur, le vieux Manuelli. Tous les personnages principaux , capitaines d'industrie  et  politiciens qui leur sont attachés, présentent au public une face lisse, un côté docteur Jekill. Ce sont des notables policés sur qui repose la santé économique et l'avenir de l'Italie. Dans les coulisses ces dirigeants sont des loups qui  s'entredéchirent, pour le pouvoir et l'argent, c'est leur côté  Mr. Hyde. Ils sont sans foi, sans morale, sans scrupule. Supprimer 500 ou 1000 emplois n'a guère d'importance, la vie d'un homme se calcule en fonction des conséquences économiques qu'elle peut engendrer, seul compte le profit et la réussite personnelle. Ces hommes ont besoin d'assouvir leurs appétits sexuels, le sexe est un défoulement à leur soif de puissance. Si certaines femmes sont des victimes des comportements machistes, des perversions et des manipulations de ces hommes, d'autres participent cyniquement  à leur jeu de prédateurs. Andrea Camilleri écrit un thriller économique très nerveux, au ton souvent ironique, remarquablement écrit et très bien dialogué. Le rythme est rapide sans aucun temps mort. Un très bon roman.

Une enquête de Gunnarstranda et Frølich

Gallimard

21,00
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9 avril 2012

Faux-semblants est le troisième volet de la série d'enquêtes qui réunit le commissaire Gunnarstranda et son adjoint l'inspecteur Frølich, personnage central de la présente histoire. Dahl construit avec habileté son récit. Comme Frølich, le lecteur est entraîné à construire des hypothèses, à suivre parfois des pistes erronées; il est amené à se faire abuser par des faux-semblants. Il est placé dans la démarche quotidienne du policier, réfléchit avec lui. Ici, pas d'effets spectaculaires. C'est un roman d'investigation classique. Mais plus que la résolution des enquêtes policières menées en parallèle, l'intérêt principal du roman provient de la découverte d'un pan du passé douloureux de l'inspecteur Frølich. Comme dans tous les bons romans policiers, l'aspect humain, la richesse des personnages et leurs relations prennent le pas sur l'intrigue. Cependant au cours de la lecture une certaine distance s'établit entre le lecteur et les personnages principaux. En effet, la personnalité des deux policiers n'est pas assez affirmée et développée. Frolich ou Gunnarstanda ne sont pas encore à la hauteur du retraité Wallender de Mankell, il leur manque une once d'épaisseur charnelle qui ferait d'eux, plus que des personnages de roman, des amis qui nous accompagneraient comme s'ils étaient réels!
Le romancier norvégien a pourtant un véritable talent d'écriture, son style est fluide, plaisant et fait de Faux-semblants une lecture agréable.

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11 janvier 2012

J'avais particulièrement apprécié "A cheval sur une tombe " que j'avais présenté sur ce blog. Hélas je n'ai pas du tout retrouvé le même plaisir à la lecture de ce long roman qui aurait mérité des coupes sombres. Pendant 360 pages , le père de Martin Webb, Doug pas très intelligent, rumine sa vengeance: Question d'honneur familial. Pendant 360 pages, trois médiocres truands se réunissent pour réaliser un splendide casse. Pendant 360 pages, Question d'éthique, le flic Harpur ne veut pas mélanger vie professionnelle et vie privée au risque de mettre en péril la vie de sa petite copine dont il pourrait être le père. Le dénouement, vite expédié (au bout de 360 pages, l'auteur se fatigue), est attendu, sans surprise (Question de morale): les truands prétentieux ou ridicules sont éliminés (devenus encombrants pour un nouveau roman), la belle étudiante ne peut pas périr, Question de physique. Les flics sont prêts à repartir pour un nouvel épisode en même temps que quelques belles tronches de mecs du milieu (surtout quand on a la gueule de Charlton Heston). James a construit ses histoires sur le principe des séries américaines,il s'est construit une "Bible" des personnages bien typés (vêtement, habitudes, vocabulaire… Question de facilité ) qui réapparaissent de roman en roman. Ce livre est un produit, mac-do d'un écrivain bourré de talent, et c'est dommage (d'où ma rogne). Ecrire : art ou grande bouffe, Question financière